Le contexte

C'est en 1999 que la France reconnaît légalement les unions de personnes de même sexe avec l'instauration du pacte civile de solidarité (PACS).

Pourtant, la revendication pour les homosexuels de pouvoir se marier est de plus en plus forte, portée au nom de l'égale dignité des personnes et de l'égalité des droits qui en découlent. Les droits ouverts par le Pacs sont très inférieurs à ceux ouverts par le mariage (droits patrimoniaux, protection du survivant, pension de réversion, adoption d'enfants ouverte aux seuls couples mariés ou célibataires). C'est l'accès au mariage et à sa symbolique qui est demandé. En 2011, le Conseil constitutionnel, saisit d'une question prioritaire de constitutionnalité, considère que le mariage homosexuel n'est ni imposé, ni interdit par la constitution. C'est au législateur qu'il appartient de décider.

Parallèlement, en Europe et dans le monde, année après année, de nouveaux pays autorisent le mariage homosexuel : les Pays-Bas en 2001, la Belgique en 2003, l'Espagne en 2005, la Suède en 2009, le Portugal en 2010 et le Danemark en 2012. Le mariage de personnes de même sexe est autorisé au Canada depuis 2005 et aux Etats Unis dans 9 états.

Les pays qui autorisent le mariage homosexuel ont adopté des législations différentes en ce qui concerne la filiation. Le Portugal refuse l'adoption et la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples mariés de même sexe. En revanche l'Espagne reconnaît aux couples de femmes l'adoption ainsi que la possibilité d'établir un lien de filiation avec l'enfant né pendant l'union. La PMA est possible pour les femmes au Danemark, en Espagne, au Pays Bas, en Belgique et en Suède. La gestation pour autrui est autorisée en Belgique aux Pays Bas et en Angleterre.

Le mariage

Le mariage, avant la Révolution française, est une prérogative exclusive de l'Eglise. En 1791 la Constitution sécularise le mariage. La loi considère le mariage comme un contrat civil. Parallèlement le divorce est autorisé à partir de 1792. Le divorce est à nouveau interdit en 1816 sous la pression de l'Eglise et de la Royauté pour être rétabli en 1884. Avec la reconnaissance progressive des droits des femmes et l'évolution des modes de vie, la famille se transforme et, désormais, plus de la moitié des premiers enfants des couples naissent hors mariage. Un tiers des enfants vivent dans des familles recomposées. Pour beaucoup le mariage n'est plus qu'un simple contrat civil qui organise la vie commune, voire, selon les mots de Noël Mamère "une célébration sociale de l'amour". Dans ce cas, rien ne s'oppose à ce que des couples de même sexe puissent se marier.

Pour de nombreux opposants aux mariages homosexuels, le mariage reste une institution à part entière et une structure fondamentale de la civilisation car il a pour finalité la reproduction. Certains de ces opposants nous ressortent même le spectre de la décadence de la société ! Ce discours nous l'avons déjà entendu lors du débat sur le PACS en 1999, le débat sur l'IVG en 1975, le débat sur la contraception en 1967. Toutes ces évolutions de notre société ont suscité de la part des droites conservatrices et des Eglises le même rejet. Sur un plan juridique, le mariage peut-être analysé de façons différentes. Le doyen Jean Carbonnier considérait ainsi que c'est la présomption de paternité qui est au coeur du mariage (le mariage fait du mari le père de l'enfant que son épouse met au monde). Pour la sociologue Irène Thery le mariage c'est le couple. Il n'y a pas dans le mariage d'engagement à la procréation.

La parentalité

Le mariage ouvre la voie à la filiation : c'est la seule institution qui articule conjugalité et parentalité. Dans un couple marié, les deux parents exercent en commun l'autorité parentale. Par ailleurs, seuls les couples mariés peuvent adopter ensemble un enfant. Tous les célibataires de plus de 28 ans peuvent adopter. La reconnaissance du droit aux couples de même sexe de se marier leur ouvrirait donc la possibilité d'adopter, qu'il s'agisse d'une adoption conjointe ou de l'adoption de l'enfant du conjoint.

Il existe actuellement des familles homoparentales, c'est-à-dire une famille ou un couple de parents dont l'orientation homosexuelle est reconnue et un ou plusieurs enfants légalement liés à l'un des parents au moins. Mais au sein de ces familles, le second parent n'a pas d'existence légale. Le mariage est une réponse à cette insécurité juridique qui pénalise les enfants.

Plus largement, les associations homosexuelles souhaitent voir étendue aux couples de femmes la PMA. Ce point n'est pas intégré dans le projet de loi sur le mariage pour tous mais il est déjà dénoncé par ses adversaires au nom du droit de l'enfant. Certains font ainsi remarquer que les enfants des familles homosexuelles bénéficiaires d'une PMA seraient les descendants d'un tiers qui resterait sans statut. Ces enfants seraient en conséquence privés de leurs origines. Mais c'est aussi le cas dans les familles hétérosexuelles qui recourent actuellement à l'adoption ou à la PMA. La question existe quelque soit la forme du couple.